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Sur le tapis rouge de Cannes avec le photographe Tristan Fewings

Sur le tapis rouge de Cannes avec le photographe Tristan Fewings

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Par Lise Lanot

Publié le

Le photographe britannique Tristan Fewings a documenté tout en élégance cette 70e édition du Festival de Cannes. Il nous raconte ces quinze jours passés dans un autre monde.

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En cette année 2017, le Festival de Cannes célèbre son 70e anniversaire. 70 ans de Palmes d’or, de tapis rouge, de glamour et de seins qui se font la malle. Pour la plupart d’entre nous, le festival se vit à travers des écrans, de télévision ou d’ordinateur, qui nous font goûter à cette folle réalité.

Si nous avons la chance d’entrevoir les événements qui se déroulent sur la Croisette, c’est en partie grâce aux nombreux photographes présents au bord du tapis rouge. Depuis deux ans, Tristan Fewings fait partie des heureux élus appelés à rapporter les souvenirs les plus marquants de cette quinzaine qui ne dort jamais. S’il nous avoue que les journées de travail sont longues et que c’est surtout l’adrénaline qui le tient éveillé, le photographe anglais ne boude pas le plaisir qu’il a à immortaliser ces moments hors du temps.

Pour la troisième année consécutive, Tristan est donc parti avec son équipe de Getty Images, l’agence avec laquelle il travaille depuis plus de trois ans et demi. Avant son départ, et croulant “sous une montagne de matériel photographique”, il nous a raconté comment il vivait l’effervescence du festival tout en gérant son travail de photographe.

“Le mot d’ordre ? Travail, travail, travail”

Pour faire vivre aux non-initiés l’effervescence de Cannes, inutile de compter sur son temps libre. Même pas le temps de visionner les films en compétition, chaque instant est consacré à la prise d’images. Les projections ont lieu quasiment en continu et il en va de même pour les soirées, officielles ou non, qui réunissent le gratin du cinéma international.

Insistant sur la nécessité de documenter tous les aspects du festival, Tristan Fewings avoue faire sérieusement l’impasse sur le sommeil durant ces deux semaines et ne tourner qu’à l’adrénaline. Un stress positif qui l’empêche de s’écrouler à la fin de journées longues de près de 18 heures et lui permet aussi de tenir le coup loin de sa famille et de gérer, au moins momentanément, la pression qui accompagne cette tâche : “Quand je m’arrête pour penser à tout le travail à accomplir, c’est terrifiant. Mais sur le moment, c’est génial et j’oublie tout.”

Effectivement, la charge de travail est monstrueuse. Chaque soir sont organisées des dizaines de projections, événements et soirées qui rassemblent de nombreux professionnels sous le feu des projecteurs. Si on peut imaginer qu’il est difficile de se faire une place parmi l’armada de photographes présents et dans la frénésie ambiante, Tristan insiste surtout sur la solidarité dont font preuve ces professionnels :

“J’adore la camaraderie de ces quelques jours. Même s’il peut y avoir quelques tensions sur le tapis rouge, on est amis quand on n’est plus en train de shooter et il y a vraiment une bonne ambiance lorsque nous attendons pour des photocalls par exemple. De plus, on peut s’inspirer les uns les autres, c’est une source de bon stress.”

Même s’il est fier d’une expérience longue de plus de vingt ans, on sent la voix du photographe s’alléger, se parer d’un sourire lorsqu’il évoque l’émulation constante qu’offre son travail. Qu’il s’agisse du matériel, des techniques ou des idées, le monde de la photographie est en constante évolution, ce qui permet aux professionnels de ne jamais arrêter d’apprendre. On peut effectivement imaginer la folie créatrice qui souffle sur un événement comme le Festival de Cannes.

Si, pour sa part, Tristan Fewings affirme ne pas trop souffrir du nombre incroyable de photographes couvrant le festival, c’est sans doute dû à sa position privilégiée. Grâce à son affiliation à l’agence Getty Images, il est en effet en mesure de choisir sa position : au lieu de se retrouver noyé parmi des dizaines d’objectifs sur le tapis rouge près des acteurs, il surplombe la foule en haut des escaliers. Cela lui permet de réaliser de belles prises de vues en plongée pour immortaliser les heureux élus qui gravissent les célèbres marches du palais des Festivals.

Cette position lui assure une vision différente des autres, pour des photos qui se démarquent. Afin de parfaire sa “touche”, il précise favoriser le noir et blanc, qui donne ce ton si particulier du “glamour des années 1950 de la Riviera”, propre au festival selon lui.

S’il est si sensible au glamour de la Croisette et souhaite parvenir à le retranscrire en images, c’est aussi parce que Tristan officie fréquemment en tant que photographe de mode : “Ce genre d’antécédents peut faire la différence, la mode est une partie intégrante du festival”, déclare-t-il, soulignant que le fait de savoir qui porte quoi constitue un atout pour saisir les à-côtés de Cannes.

Ses choix semblent fonctionner et, l’année dernière, il était revenu de Cannes avec des images marquantes du festival. Si l’homme est modeste, il avoue être très fier d’une photo de Charlize Theron, prise alors qu’elle sortait de sa voiture, vêtue d’un costume et entourée de ses gardes du corps. Au centre de l’image, l’actrice semble être la seule figure paisible parmi cet amas de visages soucieux, sur le qui-vive. Elle semble regarder l’objectif de Tristan de face, posément, directement : “Ça n’a duré qu’une seconde, révèle le photographe, j’aime capter ces moments pris sur le vif.”

Une préparation à toute épreuve

Pour rendre hommage à la fois au monde de la mode et à la sophistication du festival en lui-même, l’artiste britannique a apporté cette année des appareils argentiques, dont certains n’ont pas été utilisés depuis les années 1970. L’occasion de rappeler que la montée des marches est devenue un symbole du cinéma français, qui rayonne à travers le monde. D’un point de vue technique, Tristan ne vient pas les mains vides :

“Sur moi, j’ai toujours un kit classique composé de deux appareils photo, trois objectifs, quelques flashs, une boîte à lumière parfois, bref, de quoi être préparé à de nombreuses éventualités. Je prends parfois un objectif pour des portraits.

Les journées ne se ressemblent pas, on peut avoir Sean Penn le matin, un acteur qui monte l’après-midi et un nouveau talent hollywoodien le soir. Heureusement, je peux toujours courir à la ‘base’ mise à disposition par Getty pour son équipe, afin d’aller chercher du matériel et de parer à toute éventualité. Je pars avec beaucoup de matériel, ma valise de matériel est beaucoup plus grosse que ma valise de vêtements.”

Et Tristan Fewings n’a pas failli à sa promesse. Cette année encore ses photographies rendent un hommage élégant au festival. Ses images en noir et blanc des célébrités foulant le tapis rouge nous transporteraient presque auprès d’elles, tant il est parvenu à capter des petits moments suspendus dans l’air, des confidences à l’oreille ou un sourire sincère. Grâce à ses images, le festival sera présent un peu plus loin et un peu plus longtemps dans nos esprits.