AccueilPop culture

The Hunter, la série sauvage qui nous emmène aux côtés des chasseurs de Sibérie

The Hunter, la série sauvage qui nous emmène aux côtés des chasseurs de Sibérie

avatar

Par Joséphine Faisant

Publié le

Álvaro Laiz, photographe passionné par l’anthropologie et l’environnement, est un spécialiste des zones reculées aux quatre coins du monde. Un penchant qu’il confirme avec la série The Hunter à travers laquelle le photographe espagnol nous offre des photos surprenantes d’un peuple indigène du sud-est de la Sibérie.

À voir aussi sur Konbini

The Hunter n’est pas une série faisant l’apologie de la chasse. Le photographe Álvaro Laiz s’est surtout intéressé aux rites et croyances des Oudéguéïs qui entretiennent une relation mystique avec la nature. Pour ce peuple de “chasseurs chamanes”, la chasse est une pratique sacrée qui appelle des forces surnaturelles. Le photographe a su capturer la dimension chamanique qui caractérise la vie des Oudéguéïs, dont la chasse s’avère être la meilleure représentation.

Nous croyons aux esprits de la forêt, et à celui du feu qui nous vient en aide durant la chasse.

Álvaro Laiz évoque l’aventure du braconnier russe Markov qui, en 1997, entreprit la poursuite effrontée d’un gigantesque tigre de Sibérie. Ce dernier aurait suivi les empreintes de l’animal jusqu’à l’atteindre avec son fusil sans parvenir à le tuer. Il fut rapporté que trois jours plus tard, l’animal a fini par retrouver le braconnier et le tuer par vengeance. Pour les Oudéguéïs, attaquer un tigre, emblème de la faune de Sibérie, est un sacrilège qui déchaîne la rage vengeresse d'”Amba”, l’âme du tigre.

On pourrait voir là un paradoxe dérangeant entre les croyances animistes (qui octroient une âme aux animaux) et la pratique exaltée de la chasse de cette communauté du sud-est de la Sibérie. Un contraste idéologique qui est en fait sublimé par cette série de photos qui nous montre un groupe ethnique aux allures de chasseurs téméraires chamaniques mais habités par de profondes croyances animistes.

La beauté bestiale

Les photos de la série The Hunter sont toutes dotées d’une beauté étrange et glaciale, d’une froideur de l’effroi. La mort s’invite à chaque image ; parfois elle est au premier plan et parfois elle est suggérée, fantasmée ou redoutée. Álvaro Laiz nous montre toutes les facettes du rituel de la chasse chez les Oudéguéïs.

Le courage qui éclate dans les yeux des chasseurs, le drame dans le regard des femmes, les empreintes qui filent dans la neige, le combat qu’il faut mener, les costumes qu’il faut porter… L’avant, l’après mais aussi l’instant présent : on découvre alors toutes les nuances d’émotions, des plus humaines au plus bestiales, que peuvent éprouver les Oudéguéïs à travers la pratique de la chasse.

Des photos anthropologiques : les forces et faiblesses des Oudéguéïs

Avec The Hunter, le photographe espagnol a encore une fois prouvé son attachement à la photographie anthropologique. Chaque photo est suivie d’une explication relatant les événements récents traversés par les protagonistes. On apprend, par exemple, en dessous du cliché d’une vieille femme assise sur un lit, l’œil figé dans le vide, qu’elle avait réclamé la dépouille de son mari dont il ne restait que les jambes, le reste ayant été mangé par un tigre. Álvaro Laiz ne sombre à aucun moment dans le gore. Il nous transpose en revanche dans un espace-temps lointain dans lequel l’hégémonie de l’homme sur les animaux est sans cesse un combat.

Toute la recherche ainsi que les photos d’Álvaro Laiz seront réunies dans un ouvrage publié aux éditions Dewi Lewis, à paraître très prochainement.