#ÇaVaSaigner : le 15 juin, montrez vos règles sur Insta contre la précarité menstruelle

#ÇaVaSaigner : le 15 juin, montrez vos règles sur Insta contre la précarité menstruelle

Image :

© Ça va saigner

photo de profil

Par Pauline Allione

Publié le

Le 15 juin, "tachez vos jeans, vos stories Instagram ou les sièges de votre métro !"

L’appel résonne comme un cri de ralliement, une invitation à prendre les armes. Et pour participer au combat, il faudra être prêt à se tacher les mains – ou plutôt les fringues. Car le 15 juin, “Ça va saigner”, annonce le compte Instagram du même nom.

À voir aussi sur Konbini

Pour lutter contre la précarité menstruelle, le collectif invite toute personne menstruée à afficher le sang qui s’écoule chaque mois de son corps sur les réseaux sociaux. Sur des clichés ou esquissés au crayon, les flux doivent être laissés libres pour normaliser le sang des règles et tendre vers la gratuité des protections hygiéniques.

Parce que tout le monde n’a pas les moyens de se payer une cup, des tampons ou des serviettes chaque mois, “Ça va saigner” entend bien changer la donne. Avec son action coup de poing, ce mouvement féministe veut montrer la situation que doivent affronter, une fois par cycle, les personnes menstruées qui n’ont pas de quoi s’acheter de protection.

Une initiative soutenue par l’étudiante féministe Irene, qui, en février dernier, se promenait volontairement dans Paris sans protection hygiénique, assumant pleinement son legging taché de rouge. “Je ne demande pas la prise en charge des protections périodiques réutilisables (dans la mesure du possible) pour toutes les personnes menstruées. Je l’exige”, déclarait-elle fermement sur Instagram.

En parallèle de l’action, et toujours pour la gratuité de ces protections, une pétition adressée au gouvernement circule : “Chaque mois, pendant une semaine, nous sommes obligé·e·s de dépenser dans des protections, dans le simple but de continuer à vivre une vie normale socialement parlant”, dénonce le collectif.

La précarité menstruelle concerne 1,7 million de femmes en France

L’actrice française Corinne Masiero, dernièrement à l’affiche du film Les Invisibles, a un temps été SDF. Dans une interview pour Brut, elle revenait sur la difficulté d’être menstruée lorsque l’on vit dans la rue : “Quand t’as tes règles et que tu n’as pas de quoi t’acheter des trucs, alors tu vas chouraver des serviettes, des machins et tout. Mais il y a des fois, tu n’as pas eu le temps ou tu n’as pas pu, comment tu fais ? Tu te mets des journaux, des machins… On n’en parle jamais de ça, pourquoi ces trucs-là, ce n’est pas remboursé par la Sécu ?”

Quand on sait que la moitié de l’humanité est concernée par les menstruations, on se dit que la gratuité des protections périodiques devrait couler de source. D’autant que, selon un sondage sur l’hygiène et la précarité publié par l’Ifop en mars, 1,7 million de femmes en France manquent de protections hygiéniques. En avril 2018, la LMDE, une mutuelle étudiante, devenait pionnière dans l’Hexagone en annonçant qu’elle allait rembourser les protections hygiéniques aux personnes menstruées, via un forfait allant de 20 à 25 euros par an. Sachant que sur une vie, on estime entre 1 500 et 2 000 euros l’argent dépensé en protections hygiéniques.

Un premier pas vers la politique déjà appliquée en Écosse, où les protections sont délivrées gratuitement aux personnes à faibles revenus, et où en août dernier, le gouvernement débloquait 5,8 millions d’euros pour un accès gratuit à ces produits dans les écoles, collèges et universités.

Le sang des règles : ni bleu ni sale

À coups de taches de sang, cette action vient aussi briser un tabou solidement ancré : et si l’on montrait réellement ce que sont les règles ? Car contrairement à ce que veulent nous faire croire les publicités, non, le sang menstruel n’est pas bleu, ni complètement liquide d’ailleurs. En 2018, la marque Nana représentait pour la première fois en France du sang rouge sur une serviette hygiénique. Un spot plus que bienvenu, mais très vite censuré par les autorités audiovisuelles.

Le motif ? “Le sang sur une serviette est susceptible d’offenser le public.” Autant dire que ce n’est pas ce genre de réactions qui aidera à défaire les règles de ce mélange de honte et de saleté qui lui est si tenacement attaché. A contrario, au Museum de Kitchener, au Canada, les menstruations ne sont pas tabou. Jusqu’en mai dernier, l’exposition “Flow, the menstruation exhibition” se proposait de jouer un rôle éducatif, afin de modifier la perception des règles dans l’imaginaire collectif à travers des installations et performances artistiques.

En plus des effusions de sang qui devraient envahir les réseaux sociaux le 15 de ce mois, “Ça va saigner” prévoit des défilés dans plusieurs villes de France. Les personnes menstruées sont invitées à venir sans protection hygiénique, pour laisser couler leur sang. Et si les règles ne sont pas au rendez-vous le 15 ? On fait preuve de créativité, et on suit les tutos proposés par le collectif pour créer du faux sang et tacher sa culotte.