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Aaron Philip, mannequin handicapée, noire et queer fait sa première couverture de magazine

Aaron Philip, mannequin handicapée, noire et queer fait sa première couverture de magazine

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© Bryan Whitley

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Par Apolline Bazin

Publié le

À tout juste 18 ans, c’est une nouvelle consécration pour la jeune beauté qui secoue les normes de l’industrie de la mode.

“C’est un des plus grands moments de fierté de ma carrière. Je n’y aurais jamais pensé. Je suis juste une fille noire du Bronx, enfin d’Antigua, dans un fauteuil roulant. Je n’y crois pas et je suis tellement honorée.” Interviewée par Naomi Campbell pour le numéro spécial “#PrideMonth” de Paper Magazine, la mannequin Aaron Philip a partagé son émotion sur Instagram quand elle s’est vue en couverture, pour la première fois, d’un magazine.

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Et c’est Paper Magazine qui lui a offert cette opportunité avec le photographe noir et queer Myles Loftin. Âgé de seulement 21 ans mais déjà repéré dans le milieu de l’art, ce photographe britannique explore dans son travail la relation entre l’identité queer et la société. “Mes photos m’aident à trouver du sens dans ma manière d’évoluer dans ce monde en tant qu’homme noir et queer. […] Les communautés queer et noires sont toutes les deux généralement ostracisées dans la société, donc je me suis toujours intéressé à la façon dont nous pouvons créer des safe spaces pour tout le monde, des manières d’être présents et d’être bienveillants envers chacun”, confie-t-il

Il était donc l’artiste idéal pour photographier Aaron Philip. En seulement deux ans, cette jeune femme transgenre s’est fait une place bien à elle dans le mannequinat. Et elle entend bien ouvrir la voie des podiums de mode à plus de mannequins vivant avec un handicap.

Des Caraïbes aux spotlights

Aaron est née à Antigua-et-Barbuda, dans les Caraïbes. Rapidement, elle est diagnostiquée d’une paralysie cérébrale qui affecte ses fonctions motrices. Elle devient quadriplégique. Sa famille émigre aux États-Unis alors qu’elle est âgée de 3 ans pour la rapprocher de meilleurs soins. La crise financière de 2008 les frappe de plein fouet et la famille vit dans un foyer pour sans-abri pendant deux ans, avant d’emménager dans le Bronx.

Aaron commence à raconter sa jeune vie et ses réflexions sur le handicap sur Tumblr, ce qui lui vaut d’être remarquée une première fois par le boss de la plateforme, David Karp, qui l’invite dans ses locaux. À 13 ans, elle publie un livre intitulé This Kid Can Fly: It’s About Ability. Sa conscience des enjeux de visibilité se forme en grande partie sur les réseaux sociaux, notamment sur Twitter où elle dénonce par exemple le shooting où Kylie Jenner pose en fauteuil dans une esthétique sadomasochiste. C’est aussi grâce à un tweet viral que le jeune queer se fera connaître.

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Une ascension fulgurante et engagée

Les choses s’accélèrent sérieusement pour Aaron Philip, modèle depuis deux ans déjà. En 2017, Paper lui consacrait déjà son édito sur le “pouvoir d’influencer la prochaine génération”. La jeune femme transgenre a rapidement collaboré avec des marques de prêt-à-porter comme ASOS ou H&M, qui en faisait un des visages de sa collection “Pride 2018”. En septembre dernier, l’agence de mannequinat Elite signait Aaron. Cette dernière était également présente dans les tops des personnalités influentes de Dazed et Teen Vogue, et son visage fait aussi partie de la récente campagne Sephora.

Avant de faire la couverture de Paper, Aaron venait tout juste de faire ses débuts à la Fashion Week de New York. Une ascension fulgurante, accompagnée d’un discours fort sur la visibilité du handicap et la déconstruction des normes de beauté.

Alors qu’elle venait d’être représentée dans une prestigieuse agence de mannequins et d’être acceptée dans la grande école de mode Parsons School of Design, Aaron réaffirmait à Them : “Je suis entrée dans le monde de la mode avec l’intention de rendre l’industrie plus diversifiée, inclusive et accessible.” Comme pour mettre au défi les géants du luxe, elle écrit son ambition de défiler pour les plus grandes marques et conclut sa tribune ainsi : “J’espère qu’un jour prochain, les mannequins transgenres et handicapé·e·s pourront connaître le même succès que n’importe quel mannequin talentueux·se et travailleur·se. Je ne me contenterai pas de moins. On se voit sur le runway.” You go girl !