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Des années 1970 à nos jours, Steven Rifkin immortalise la douceur de l’Amérique en noir et blanc

Des années 1970 à nos jours, Steven Rifkin immortalise la douceur de l’Amérique en noir et blanc

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Par Donnia Ghezlane-Lala

Publié le

D’États en États, Steven Rifkin nous fait traverser l’Amérique des années 1970 à aujourd’hui.

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“Ce travail ne documente pas le monde mais il parle de ses émotions, de sa propre vie” : voici comment la galerie parisienne Les Douches présente le travail de Steven Rifkin, exposé jusqu’au 8 mars 2018. Depuis plus de trente ans, ce photographe âgé de 63 ans collectionne de précieux tirages photographiques qui documentent l’Amérique au fur et à mesure de ses transformations.

C’est dans son studio qu’il les range et c’est dans ce même studio, situé à Mount Vernon dans la banlieue de New York, que la directrice de la galerie Les Douches, Françoise Morin, a déniché ces travaux aujourd’hui exposés. Ce sont de vrais trésors en petit format carré, en noir et blanc, affichés sur les murs bétonnés de ces anciennes douches publiques.

Le visage serein de l’Amérique

Steven Rifkin a trouvé sa voie dans la photo assez rapidement. À 11 ans, en 1965, il reçoit son premier appareil photo, un Kodak Instamatic, offert par son oncle venu de Johannesburg, en visite chez lui à Saint-Paul : “L’effet profond qu’a eu sur moi cet appareil, le temps passé à prendre des photos et à les regarder avec mon oncle, fut déterminant.”

À partir de ce moment, l’intérêt que son oncle lui porte l’encourage à prendre en photo tout ce qu’il croise sur son chemin et capte son œil : “Un buisson, un morceau de trottoir, la cime des arbres, des boulevards, des allées privées, quelques toitures et des lignes électriques.” Autant de détails qui constitueront sa signature, sans qu’il le sache, au fil des années, et qui le mèneront à étudier la photographie. Pour autant, son style ne cesse d’évoluer :

“Mon univers, comme mes photos, a changé́. Les images sont devenues un peu plus abstraites, comme libérées de la représentation du quotidien. Les scènes de rue et les personnages ont laissé́ place à̀ une approche plus conceptuelle. Un univers incertain, à l’image du monde tel que je le vois.

Un monde dans lequel je me réveille chaque matin avec le sentiment d’être déconnecté de la politique, du brouhaha égoïste, de l’absence d’amour entre les peuples et de leur manque d’espoir. Un monde où l’on prêche l’amour de son prochain mais où l’on tue ceux qui sont différents.

Mes photos m’ont toujours permis de m’échapper dans un espace plus libre, où mon esprit pourrait voguer à̀ sa guise. Un lieu où je peux m’évader à loisir et réfléchir sereinement quand plus rien ne fait sens.”

Dans une démarche personnelle mais aussi documentaire, Steven Rifkin a posé son regard sur des détails qui habitaient son quotidien. On peut parler d’une certaine douceur de vivre américaine, similaire dans le style à celle de Diane Arbus, mais sans les problèmes sociaux que cette dernière s’est attachée à photographier.

On y voit des portraits de gens dans la rue, des scènes anecdotiques mais attendrissantes, des ombres et des voitures. Tout y est raffiné et bien pensé. À propos du travail de Steven Rifkin, le scénariste Olivier Beer raconte :

“Steven Rifkin nous promène […] dans une Amérique que l’on n’avait quasiment jamais vue de la sorte, […] nous fait découvrir une Amérique d’une pureté́ étonnante, et ses habitants sont photographiés comme autant d’acteurs d’une comédie musicale muette filmée en noir et blanc. […]

Rifkin n’appartient à aucune tradition ; il est sa propre tradition, comme il nous raconte sa propre Amérique. Une Amérique pacifiée, où Kennedy et Luther King n’auraient jamais été assassinés, une Amérique qui n’aurait pas connu le Viêt Nam, une Amérique dont Donald Trump ne serait pas le président.”

Au fil du temps, exposition de Steven Rifkin, jusqu’au 3 mars 2018 à Les Douches la galerie.